Recueil n° 3 – 2014 4
La particularité de
L’ANGE PORTEUR DE LUMIÈRE
(huile sur toile - 50 x 150 cm)
réside dans le fait que cette œuvre peut être regardée sous divers éclairages. L’artiste précise d’ailleurs que ce
tableau a été conçu pour être observé la nuit. Et ce n’est nullement une fantaisie car cette étude est avant tout
une réflexion sur la lumière en tant que matière à la fois tactile et visuelle : la lumière existant dans sa matière
propre naissant du cœur de la nuit.
Le sujet même « baigne » pour ainsi dire dans la lumière :
Lucifer
que les Romains associaient à Venus, l’étoile
du matin, et que le
Livre d’Hénoch
de la tradition biblique assimile à Satan (l’ange déchu).
Même dans l’obscurité la plus dense, cette œuvre brille de tous ses feux car la lumière transperce l’ombre faisant
en sorte que l’image existe : il n’y a pas d’image sans lumière !
« Que la lumière soit et la lumière fut » n’est pas une banalité rhétorique. Elle est au centre d’un phénomène à la
fois physique et philosophique : celui du
visible
.
Avec
L’ANGE PORTEUR DE LUMIÈRE
, tout brille, tant dans les couleurs que dans le trait accentuant la pose
ainsi que le visage de l’ange. L’artiste a fait appel à un modèle pour prendre la pose voulue. De même qu’il a fallu
un long travail de mémorisation concernant le dessin préparatoire pour pouvoir le restituer. Œuvre à dominante
rouge, ce tableau marie une symphonie de tonalités audacieuses : le jaune, le violet, le bleu, le vert et le noir.
Savamment agencées, elles sont portées au regard par la couche d’huile étalée à la brosse, révélant à l’œuvre le
soleil qu’elle porte en son sein. Notons que la position des bras de l’ange rejoint celle du personnage du diptyque.
Ils sont écartés, presque en signe d’accueil, terminés par des mains tendues dans un état de grâce. D’ailleurs,
c’est l’état de grâce qui caractérise
Lucifer
. Il faut le considérer comme un ange baignant encore dans sa pureté
originelle. Il se trouve au cœur d’une spiritualité en dehors des sentiers battus, car si l’on y regarde de près, on
s’aperçoit que
Lucifer
fut, au regard de la tradition biblique, la première créature souffrante. Une créature qui, en
quelque sorte, préfigure l’Homme dans ses pulsions narcissiques.
Les anges de LESLIE BERTHET-LAVAL participent des ancêtres illuminant notre mémoire. Ils se manifestent
dans nos rêves, transportés par le véhicule de l’imaginaire. Ils nous définissent et nous protègent. Bien que
l’artiste s’émeuve devant les manifestations de spiritualité exprimées par les croyants de toutes confessions, ses
propres anges sont issus d’un élan immanent, se nourrissant de problématiques universelles.