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Recueil n° 3 – 2014 3
Cette communion entre trait et matière se perçoit surtout dans ce
diptyque
représentant un personnage en mouvement (panneau de gauche), répondant à un cheval bondissant (panneau
de droite). Cette œuvre est une invocation au mouvement à l’intérieur duquel le trait, assurant la viabilité de
l’action, est précisé par un apport considérable de matière étalée au couteau assurant une totale mise en relief.
L’ensemble se présente comme un véritable réseau de pistes polychromées à dominante jaune, blanche et
bleue, conférant à l’ensemble l’essence même du
mouvement
.
Entre les deux panneaux un rapport dialectique s’installe : le chromatisme de la scène de droite répond à celui de
la gauche. Les zones blanche et jaune du panneau de gauche répondent à la haute note mauve parsemant la
presque totalité du panneau de droite.
Il est impératif de prendre son temps avec une artiste telle que LESLIE BERTHET-LAVAL, car une myriade de
détails construisent le tableau, notamment cette foule de segments conçus à la matière étalée au tube (considéré
par l’artiste comme le prolongement de sa main) qu’elle vide frénétiquement, d’un coup, lorsqu’elle crée « en
apnée » comme elle le dit elle-même. Il s’agit, avant tout, d’une peinture intuitive que l’artiste amorce au fusain :
l’ébauche de la courbe restée parfaitement visible sur la toile. Ce trait qu’elle exprime frénétiquement, met en
exergue son incontournable talent de dessinatrice. Le trait, appuyé dans sa matière par le couteau, précise,
explore les contours du corps en dynamisant le mouvement. Ce dernier galvanise à la fois la courbure du cheval
(panneau de droite) ainsi que la posture du personnage du panneau opposé. Ce même mouvement a une
fonction antithétique, en ce sens qu’il est formé de demi-cercles brisés en leur milieu (la séparation entre les deux
panneaux). Le mouvement rotatoire de droite répond à celui de gauche exactement comme pour les couleurs.
L’artiste puise également dans la culture iconographique du passé : la tête du cheval s’inspire de l’esthétique
baroque de
RUBENS
.
Le
mouvement
ne peut à lui seul dynamiser l’espace de la toile. Il faut un autre élément qui le révèle au regard :
la
lumière
.